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que je vous ai fait naître ; c’est moi qui ai conduit toutes vos actions ; en un mot, vous me devez tout ce que vous êtes : ne m’avez-vous pas bien de l’obligation ?

Pas beaucoup, répondit Prenany. Je ne dirois pas à d’autres ce que je vais vous avouer ; car il ne faut se plaindre de ses défauts qu’à ceux qui nous les ont donnés, ou qui peuvent y remédier. Mais il me paroît que vous ne m’avez pas donné beaucoup d’esprit, & que vous n’avez pas mêlé un grand intérêt dans mes aventures.

Comment, ingrat, dit l’inconnu, je ne vous ai pas donné un génie supérieur ! Et en aviez-vous besoin ? Ne vous êtes-vous pas tiré à merveille de toutes les occasions où vous vous êtes rencontré ? Vous n’avez pas voyagé bien loin ; mais s1 vous aviez vu les autres héros à qui j’ai donné la naissance, vous les trouveriez aussi fades que vous. Les plus distingués n’ont que des pensées communes, & qu’ils répètent sans cesse ; qu’il faut préférer l’honneur à l’amour ; qu’il faut affronter le trépas d’un œil serein, & que c’est un bonheur de mourir pour la gloire ou pour sa maîtresse. Si je leur ai donné plus de courage qu’à vous, cela ne me coûte rien ; si vous m’eussiez dit cela, je vous aurois fait vain-