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les grandes routes frayées par les gouverneurs des provinces, & de passer par des villes où il y a garnison russienne en suivant les chemins ordinaires, nous serions découverts indubitablement & en prenant des routes détournées, nous ne saurions manquer de mourir de faim. Par conséquent si est certain qu’on ne sauroit former une pareille entreprise sans se rendre coupable de la plus haute extravagance.

Cette seule réponse me réduisit au silence & me satisfit pleinement. Elle me fit parfaitement bien comprendre que ces exilés étoient aussi-bien emprisonnés dans les vastes campagnes de la Sibérie que s’ils étoient resserrés dans la citadelle de Moscow. Cette conviction ne m’empêcha pas de me mettre dans l’esprit que j’étois en état de tirer ce grand homme de sa triste solitude, ni d’en former le dessein quelque dangereux qu’il pût être pour moi-même. Un soir, je trouvai l’occasion de lui expliquer mes pensées là-dessus, & de lui en faire la proposition. Je lui représentai qu’il m’étoit fort aisé de l’emmener avec moi puisqu’il n’étoit gardé de personne, & que j’avois résolu de m’en aller à Archangel & non à Moscow : que, dans cette route, je pouvois marcher avec mon train en guise d’une petite caravane & qu’ainsi je ne serois pas obligé de chercher des