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Les aventures

nité, sont de mon sentiment. J’en reviens à mon histoire.

Pendant cette bataille comique, nous avions, mon associé & moi, si bien employé les gens que nous avions à bord, que le vaisseau fut enfin redressé. Les canons étoient déjà remis dans leurs places, & le canonnier me pria d’ordonner à ceux de nos chaloupes de se retirer, parce qu’il vouloit faire feu sur les ennemis.

Je lui dis de n’en rien faire, & que le charpentier nous en délivreroit bien sans le secours du canon ; j’ordonnai seulement au cuisinier de faire chauffer une autre chaudronnée de poix. Mais heureusement nous n’en eûmes que faire ; les pauvres diables étoient si mécontens de leur premier assaut, qu’ils n’avoient garde d’en tenter un second. D’ailleurs, ceux qui étoient le plus éloignés de nous, voyant le vaisseau redressé & à flot, commençoient apparemment à sentir leur méprise, &, par conséquent, ils ne trouvoient pas à propos de pousser plus loin leur dessein.

C’est ainsi que nous nous tirâmes d’affaire d’une manière divertissante, & ayant porté à bord, quelques jours auparavant, seize bons cochons gras, du riz, des racines, & du pain, nous résolûmes de remettre en mer à quelque prix que ce fût, persuadés que, le jour d’après, nous nous trouverions environnés d’un si grand