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Les aventures

j’achetai une métairie dans le comté de Bedford, dans le dessein de m’y retirer : la maison étoit jolie, & les campagnes qui étoient autoir, étoient fort propres à être améliorées. Rien ne me convenoit mieux, puisque naturellement j’avois beaucoup de goût pour l’agriculture & pour tous les soins qu’il faut se donner pour accroître les revenus d’une terre. D’ailleurs, ma maison de campagne étoit éloignée de la mer ; ce qui m’empêchoit de renouveler mes folies par le commerce de gens de mer, & par le récit de tout ce qui regardoit les pays lointains.

M’y étant établi avec ma famille, j’achetai des charrues avec tout ce qu’il faut pour cultiver les terres ; je me fournis de charrettes, d’un charriot, de chevaux, de vaches, de brebis ; & me mettant à travailler avec application, je me vis en six mois de tems un véritable gentilhomme campagnard. Je me donnai tout entier à diriger mes laboureurs, à planter, à faire des enclos, & je crus mener la vie la plus fortunée que la nature puisse fournir à un homme qui, après de longs embarras, cherche un asyle contre de nouvelles infortunes.

Je cultivois ma propre terre ; je n’avois point de rentes à payer ; j’étois le maître de planter, d’arracher, de bâtir, de jeter bas, comme je le trouvois à propos : tout ce que je recueillois étoit pour moi-même, & toutes mes améliorations