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de Robinson Crusoé.

D’ailleurs, ils n’en doutèrent point dès qu’ils virent sa gravité, & le scrupule qu’il se faisoit de marier ces femmes avant qu’elles fussent baptisées, & qu’elles eussent embrassé la religion chrétienne. Cette délicatesse de conscience leur donna un respect extraordinaire pour lui.

Pour moi, je commençai à craindre qu’il ne poussât ses scrupules assez loin, pour ne les pas marier du tout ; j’avois beau l’en vouloir détourner, il me résista avec fermeté, quoiqu’avec modestie ; & enfin il refusa absolument d’aller plus loin, avant d’avoir pressé là-dessus les hommes & les femmes. J’avois peine d’abord à y consentir ; mais enfin j’en tombai d’accord, parce que je voyois la sincérité de son intention.

Il leur dit d’abord que je l’avois instruit de leur situation & de leur dessein, qu’il désiroit fort de l’accomplir, & de les marier, comme ils le souhaitoient ; mais qu’avant de le faire, il devoit absolument avoir une conversation sérieuse avec eux. Selon les loix formelles de la société, leur dit-il, vous avez vécu jusqu’ici dans un commerce illicite, & il n’y a qu’un mariage légitime, ou une séparation qui puisse mettre fin à votre conduite criminelle. Mais il y a encore une autre difficulté, qui regarde les loix du christianisme ; & il ne m’est pas permis de marier des chrétiens à des sauvages, à des