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Les aventures

vie par la bénédiction du ciel, mais vous m’avez permis encore de faire ce voyage avec vous. Vous avez été assez obligeant pour me considérer comme votre ami, & pour me permettre de vous parler avec franchise. Vous voyez par mon habit de quelle religion je suis, & je puis deviner la vôtre par votre patrie. Mon devoir est sans doute de faire, en toute occasion, tous les efforts possibles pour porter les hommes dans le sein de l’église catholique, & de leur donner la connoissance de la religion que je crois la seule véritable. Mais comme je me considère ici comme un de vos domestiques ; vos bienfaits, les règles de la civilité & de la justice même me forcent à ne rien faire sans votre permission. Ainsi, monsieur, je ne prendrai jamais la liberté d’entrer en dispute sur quelque point de religion, touchant lequel nous n’avons pas les mêmes sentimens, à moins que vous ne le trouviez à propos.

Je lui répondis que je trouvois dans sa conduite autant de prudence que de modération ; qu’il étoit vrai que j’étois de ceux qu’on traite d’hérétiques dans son église, mais qu’il n’étoit pas le premier catholique romain avec lequel j’avois lié conversation, sans m’emporter à ces transports de zèle qui ne peuvent que rendre ces sortes d’entretiens grossiers & inutiles : qu’il pouvoit être persuadé que ses sentimens n’altéreroient