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de Robinson Crusoé.

grain, du lait, des raisins secs, &c. S’ils tuoient un chevrau, ou s’ils trouvoient une tortue, elle en avoit toujours sa part ; de manière que tous ensemble ils vivoient assez bien, quoique, comme j’ai déjà dit, il s’en fallût de beaucoup qu’ils n’eussent la même application que les Anglois qui faisoient une colonie à part.

Il y avoit une particularité dans la conduite de tous les Anglois, que je ne dois pas passer sous silence. La religion étoit une chose absolument inconnue parmi eux. Il est vrai qu’ils se faisoient souvenir assez souvent les uns les autres, qu’il y avoit un Dieu, en jurant à la manière des gens de mer ; mais cette espèce d’hommage qu’ils rendoient à la divinité, étoit fort éloigné d’être un acte de dévotion, & leurs femmes, pour être mariées à des chrétiens, n’en étoient pas plus éclairées. Ils étoient eux-mêmes fort ignorans dans la religion, & par conséquent fort incapables d’en donner quelque idées à leurs femmes. Toutes les lumières qu’elles avoient acquises par le mariage, c’est que leurs maris leur avoient enseigné à parler l’Anglois passablement, comme aussi à leurs enfans, qui étoient environ au nombre de vingt, & qui apprenoient à s’énoncer en Anglois, dès qu’ils étoient en état de former des sons articulés, quoiqu’ils s’en acquitassent d’abord d’une