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de Robinson Crusoé.

de bon matin, nous vînmes mouiller sous une petite pointe de terre qui étoit assez élevée ; & comme la marée montoit, nous attendions tranquillement qu’elle nous portât plus avant. Xuri, qui avoit, à ce qu’il paroît, les yeux plus perçans que moi, m’appela tout bas, & me dit que nous ferions mieux de nous éloigner du rivage ; « Car, continua-t-il, ne voyez-vous pas le monstre effroyable qui est étendu, & qui dort sur le flanc de ce monticule ? » Je jetai les yeux du côté qu’il montroit du doigt ; & véritablement je vis un monstre épouvantable ; car c’étoit un lion d’une grosseur énorme & terrible, couché sur le penchant d’une éminence, & dans un petit enfoncement qui le mettoit à l’ombre. « Xuri, dis-je alors, allez à terre & vous le tuerez. » Xuri parut tout effrayé de ce que je lui proposois, & me fit cette réponse : Moi tuer lui ! hélas’ lui croqueroit moi d’un morceau. Enfin je ne parlai pas davantage de cela ; mais je lui dis de ne point faire de bruit. Nous avions trois fusils ; je commençai par prendre le plus grand, qui avoit presque un calibre de mousquet, j’y mis une bonne charge de poudre, & trois grosses balles, & le posa à côté de moi : j’en pris un autre que je chargeai à deux balles ; & enfin le troisième, dans lequel je fis couler cinq chevrotines. Ensuite reprenant celui qui avoit été chargé