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de Robinson Crusoé.

de raconter à leur peuple que leurs compagnons avoient été tués par la foudre & par le tonnerre, & que les deux ennemis qui leur avoient apparu, étoient sans doute des esprits descendus du ciel pour les détruire. Il étoit confirmé dans cette opinion, parce qu’il avoit entendu dire aux fuyards qu’ils ne pouvoient pas comprendre que des hommes pussent souffler foudre, parler tonnerre, & tuer à une grande distance, sans lever seulement la main.

Ce vieux sauvage avoit raison ; car j’ai appris ensuite que ceux qui s’étoient sauvés dans le canot étoient revenus chez eux, & avoient donné une telle épouvante à leurs compagnons, qu’ils s’étoient mis dans l’esprit, que quiconque oseroit approcher de cette Isle enchantée seroit détruit par le feu du ciel : on peut juger s’ils furent assez hardis pour s’y exposer. Mais comme alors ces circonstances m’étoient inconnues, je fus pendant quelque tems dans des appréhensions continuelles, qui m’obligèrent à être sur mes gardes, & à tenir toutes mes troupes sous les armes. Nous étions quatre alors, & je n’aurois pas craint d’affronter une centaine de nos ennemis en rase campagne.

Cependant ne voyant pas arriver un seul canot sur mon rivage pendant assez de tems, mes frayeurs s’apaisèrent, & je commençais à déli-