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Les aventures

odeur, & d’ensevelir en même tems les restes affreux du festin, qui étoient répandus sur le rivage en quantité. J’étois si fort éloigné de le faire moi même, que je ne pouvois pas y penser sans horreur, & que j’en détournois les yeux quand j’étois obligé de passer par cet endroit. Pour mon sauvage, il s’en acquitta si bien, qu’il ne resta pas seulement l’apparence ni du combat, ni du festin, & que je n’aurois pas pu reconnoître le lieu même sans la pointe du bois qui s’avançoit de ce côté-là.

Je crus qu’il étoit tems alors d’entrer en conversation avec mes nouveaux sujets. Je commençai par le père de Vendredi, à qui je demandai ce qu’il pensoit des sauvages qui s’étoient échappés, & si nous devions craindre qu’ils ne revinssent à cette isle avec des forces capables de nous accabler. Son sentiment étoit qu’il n’y avoit aucune apparence qu’ils eussent pu résister à la tempête, & qu’ils devoient être tous péris, à moins d’avoir été portés du côté du Sud, sur certaines côtes où ils seroient dévorés indubitablement. A l’égard de ce qu’il pourroit arriver, en cas qu’ils eussent été assez heureux pour regagner leur rivage, il me dit qu’il les croyoit si fort effrayés par la manière dont ils avoient été attaqués, si étourdis par le bruit & par le feu de nos armes, qu’ils ne manqueroient pas

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