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Les aventures

& je lui ordonne de percer jusques-là pour découvrir à quoi les sauvages s’occupoient. Il le fit, & vint bientôt me rapporter qu’on les voyoit de-là distinctement, qu’ils étoient tous autour de leur feu, se régalant l’un de la chair de leurs prisonniers, & qu’à quelques pas de-là, il y en avoit un autre garotté & étendu sur le sable, qui auroit bientôt le même sort : que ce dernier n’étoit pas de leur nation ; mais un des hommes barbus qui s’étoient sauvés dans son pays avec une chaloupe. Ce rapport, & sur-tout la particularité du prisonnier barbu, ranimèrent toute ma fureur : je m’avançai vers l’arbre moi-même, & j’y vis clairement un homme blanc couché sur le sable, les mains & les pieds garottés : les habits dont je le vis couvert ne me laissèrent pas douter que ce ne fût un Européen.

Il y avoit un autre arbre revêtu d’un petit buisson, plus près de leur horrible festin, d’environ cinquante verges, où si je pouvois parvenir sans être apperçu, je vis que je les aurois à demi-portée de fusil. Cette découverte me donna assez de prudence pour maîtriser ma passion pour quelques momens, quoique ma rage fût montée pour jusqu’au plus haut degré, & me glissant derrière quelques broussailles, je parvins à cet endroit où je trouvai une petite élévation d’où je découvris,