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de Robinson Crusoé.

il sera le plus misérable de tous les mortels, s’il va dans les pays étrangers : je n’y consentirai jamais ».

Ce ne fut qu’un an après ceci, que je m’échappai. Cependant je m’obstinois à fermer l’oreille à toutes les propositions qu’on me faisoit d’embrasser une profession. Souvent même je me plaignois à mon père & à ma mère qu’ils fussent si fermes à me contrecarrer dans une chose pour laquelle je me sentois une inclination prédominante.

Mais un jour me trouvant à Hull, où j’étois allé par hasard, & sans aucun dessein formé de prendre l’essor, j’y rencontrai un de mes camarades, qui étoit sur le point d’aller par mer à Londres, sur le vaisseau de son père. Il m’invita à aller avec eux, & pour mieux m’y engager, il me tint le langage ordinaire des mariniers ; savoir, qu’il ne m’en coûteroit rien pour mon passage. Là-dessus je ne consulte plus ni père ni mère : je ne me mets pas en peine de leur faire savoir de mes nouvelles ; mais remettant la chose au hasard, sans demander la bénédiction de mon père, ni implorer l’assistance du ciel, sans faire attention ni aux circonstances, ni aux suites, je me rendis à bord d’un vaisseau qui alloit à Londres. Ce jour, le plus fatal de toute ma vie, fut le premier Septembre de l’an mil six cent cinquante-un. Je