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de Robinson Crusoé.

mes haies aussi fortes & même plus fortes que les meilleures murailles.

Tous ces travaux témoignoient bien que je n’étois pas paresseux, & que je n’épargnois ni soins ni peines pour me procurer de quoi vivre avec quelque aisance. « Le troupeau de boucs, disois-je en moi-même, est pour toute ma vie, fût-elle de quarante années, un magasin vivant de viande, de lait, de beurre & de fromage. Je ne dois donc rien négliger pour ne pas les perdre ».

Mes vignes étoient aussi dans ces quartiers : j’en tirois des provisions de raisins pour tout l’hiver. Je les ménageois avec toute la précaution possible. C’étoient mes mets les plus délicieux. Ils me servoient de médecine, de nourriture & de rafraîchissemens.

D’ailleurs cet endroit étoit justement à mi-chemin de ma forteresse & de la baie où j’avois mis mon canot. Lorsque j’allois le visiter, je m’arrêtois ici, & j’y couchois une nuit. J’ai toujours eu grand soin de mon canot : je prenois beaucoup de plaisir à me promener sur la mer ; mais ce n’étoit que sur ses bords. Je n’osois m’en éloigner tout au plus que de deux jets de pierre. J’appréhendois que le vent, quelque courent, ou quelqu’autre hasard ne m’emportât bien loin de mon île. Mais me voici insensiblement arrivé à