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de Robinson Crusoé.

hors la société, il ne manquoit rien pour être parfaitement heureux.

Durant cet intervalle de tems, je me perfectionnai beaucoup dans les professions mécaniques auxquelles mes nécessités m’obligeoient, & particulièrement je conclus, vu le manque où j’étois de plusieurs outils, que j’avois des dispositions toutes particulières pour la charpenterie.

Je devins un excellent maître potier ; j’avois inventé une roue admirable par laquelle je donnai à mes vaisselles, auparavant d’une étrange grossiereté, un tour & une forme très-commodes. Je trouvai aussi le moyen de faire une pipe ; cette invention me causa une joie extraordinaire, & si je l’ose dire, une si grande vanité, que je n’en ai jamais senti de pareille dans toute ma vie. Bien qu’elle fût grossière & de la même couleur & de la même matière que mes autres ustensiles de terre, cependant elle tiroit la fumée, & servoit assez bien à mon plaisir. J’aimois à fumer, & dans la croyance qu’il n’y avoit point de tabac dans mon île, j’avois négligé de prendre avec moi les pipes qui étoient dans le vaisseau.

Je fis aussi des progrès très-considérables dans la profession de vanier ; je trouvai moyen de faire plusieurs corbeilles qui, bien qu’elles fussent mal tournées, ne laissoient pas de m’être très-utiles. Elles étoient aisées à porter, & propres à y res-