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Les aventures

est dans ce climat la saison propre pour la seconde moisson.

Avant de commencer cette corvée, je n’étois pas peu intrigué pour savoir comment je suppléerois à une faucille ; car il m’en falloit une pour couper le bled. Je n’eus pas d’autre parti à prendre que de m’en fabriquer une du mieux que je pus avec un des sabres, ou des coutelas que j’avois sauvés parmi les autres armes restées dans le vaisseau. Comme ma récolte avoit été peu de chose, celle-ci me coûta moins de peine à recueillir. D’ailleurs je n’y cherchai pas d’autre façon que les épis seuls ; & ensuite je les égrainai entre mes mains. Ma moisson étant achevée, je trouvai que de mon demi-picotin que j’avois semé, il m’étoit provenu près de deux boisseaux & demi d’orge ; du moins autant que je pouvois conjecturer, parce que je n’avois aucune mesure.

Ceci ne laissa pas de me donner beaucoup de courage ; c’en étoit assez pour me faire connoître que la divine Providence voudroit bien un jour ne me pas laisser manquer de pain : néanmoins je me voyois encore dans un grand embarras ; car je ne savois ni comment moudre ce grain pour en faire du pain, ni comment cuire ce pain quand même je serois parvenu à le pétrir. Toutes ces difficultés jointes au desir que j’avois d’amasser une bonne quantité de provisions, & d’avoir par