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de Robinson Crusoé.

reux de ce que, bien loin d’être réduit à la disette & à la nécessité de jeûner, je jouissois d’une parfaite abondance assaisonnée de délicatesse.

Durant ce voyage je ne faisois jamais plus de deux milles ou environ par jour, à prendre par le plus court ; mais je faisois tant de tours & de détours, pour voir si je ne ferois point quelque belle découverte, que j’étois suffisamment las & fatigué toutes les fois que j’arrivois au lieu où je voulois choisir mon gîte pour toute la nuit ; & alors je m’allois nicher sur un arbre, ou bien je me logeois entre deux arbres, plantant un rang de pieux à chacun de mes côtés, pour me servir de barricades, ou du moins pour empêcher que les bêtes sauvages ne pussent venir sur moi, sans auparavant m’éveiller.

Dès que je fus venu au bord de la mer, mon admiration augmenta pour ce côté de l’île ; tout ce qui se présentoit à ma vue me confirmoit dans l’opinion où j’étois dékà, que le plus mauvais lot m’étoit échu en partage. Le rivage que j’habitois ne m’avoit fourni que trois tortues en un an & demi de tems ; au lieu que celui que j’étois à contempler en étoit couvert d’un nombre innombrable : tout y fourmilloit d’oiseaux de plusieurs sortes, dont les uns m’étoient connus de vue, les autres inconnus, la plûpart très-bons à manger,