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Les aventures

richesses. Cette pensée rejeta mon ame dans sa première léthargie.

Voyant ensuite que trois secousses n’étoient suivies d’aucune autre, je commençai à reprendre courage, & néanmoins je n’osois pas encore passer par-dessus ma muraille de peur d’être enterré tout vif ; mais je demeurai sans me bouger, assis à terre, dans l’affliction, & dans l’incertitude de ce que je devois faire. Durant tout ce tems, je n’avois aucune pensée sérieuse de religion, si ce n’est que je prononçois de tems en tems du bout des lèvres ce formulaire : seigneur, ayez pitié de moi ; encore cette ombre de religion ne dura-t-elle guères, & s’évanouit aussi vîte que le danger.

L’air s’obscurcissoit, & le ciel se couvroit de nuages, comme s’il alloit pleuvoir. Bientôt après le vent s’éleva peu-à-peu, & alla si fort en augmentant, qu’en moins d’une demi-heure, il souffla un ouragan furieux. À l’instant vous auriez vu la mer blanchie de son écume, le rivage inondé des flots, les arbres arrachés du sein de la terre, & tous les ravages d’une affreuse tempête. Elle dura près de trois heures, ensuite elle alla en diminuant ; au bout de trois autres heures il fit calme, & il commença à pleuvoir extrêmement fort.

Cependant j’étois dans la même situation de corps & d’esprit, quand tout-à-coup je fis réflexion que ces vents & cette pluie étant une suite natu-