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de Robinson Crusoé.

jours à la terre. En conséquence de ce raisonnement, je me mis dans l’eau, & je traversai à la nâge cette plage qu’il y avoit entre le vaisseau & les sables ; mais ce ne fut pas sans beaucoup de peine, tant à cause du poids des choses que je portois sur moi, que de l’agitation de la mer, car le vent s’éleva si brusquement qu’il y eut une tempête avant même que la marée fût haute.

Mais j’étois déjà arrivé chez moi, à l’abri de l’orage, & posté dans ma tente, au centre de mes richesses. Il fit un gros tems toute la nuit ; & le matin, quand je voulus regarder en mer, je vis qu’il ne paroissoit plus de vaisseau. La surprise où je fus d’abord, fit bientôt place à ces réflexions consolantes, savoir que je n’avois point perdu de tems, que je n’avois épargné ni soin ni peine pour en tirer tout ce qui me pouvoit être de quelque utilité, & que, quand même j’aurois eu plus de loîsir, à peine y avoit il encore quelque chose que je pusse emporter de toutes celles qui restoient à bord.

Dès-lors je ne pensai plus ni au vaisseau, ni à ce qui m’en pourroit provenir, excepté ce que la mer pourroit jeter de ces débris sur le rivage, comme en effet, elle en jeta plusieurs morceaux dans la suite ; mais ils ne me servirent pas de grand’chose.