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Les aventures

mais qu’étant posé sur le flanc du banc, dont le sable étoit ferme, il portoit sa poupe extrêmement haut, & la proue si bas, qu’elle en étoit presque dans l’eau. De cette manière le point étoit tout-à-fait exempt d’eau, & tout ce qu’il renfermoit étoit sec ; car vous pouvez bien compter que la première chose que je me mis à fait, fut de chercher par-tout, & de voir ce qui étoit gêté, ou ce qui étoit bon. Premiérement, je trouvai que toutes les provisions du vaisseau étoient séches, & qu’elles ne se sentoient pas de l’eau ; comme j’étois très-disposé à manger je m’en allai à la source, où je remplis mes poches de biscuit, & je me mis à en manger à mesure que j’étois à faire d’autres choses ; car je n’avois pas de tems à perdre. Je trouvai aussi du rum[1] dans la chambre du capitaine, & j’en bus un bon coup ; de quoi j’avois bon besoin pour m’encourager à soutenir la vue des souffrances que j’aurois à essuyer.

Il ne m’auroit de rien servi de demeurer les bras croisés, & de perdre le tems à souhaiter ce que je ne pouvois aucunement obtenir. Cette extrémité excita mon application. Nous avions à bord plusieurs vergues, un ou deux mâts du per-

  1. Espèce de liqueur qui approche fort de l’eau-de-vie, dont on se sert sur mer.