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de Robinson Crusoé.

maux rodent toutes les nuits pour chercher leur proie.

L’unique remède qui se présentoit à tout cela pour le tems présent, c’étoit de monter sur un certain arbre, dont le branchage étoit fort épais, semblable à un sapin, mais épineux, qui croissoit près de-là, & où j’avois résolus de passer toute la nuit, en attendant le genre de mort qu’il me faudroit subir le lendemain ; car jusqu’alors l’arrêt m’en paroissoit irrévocable. Je marchai environ un demi quart de mille loin du rivage, pour voir si je ne trouverois point d’eau douce, pour boire ; j’eus le bonheur d’en trouver, ce qui me donna une joie sans pareille. Après avoir bu & m’être mis un peu de tabac dans la bouche pour prévenir la faim, je m’en allai à l’arbre, sur lequel je montai, & cherchai à me mettre si bien que je ne tombasse pas, si je venois à dormir : j’avois à la main un bâton court, comme un bon tricot, que j’avois coupé pour me servir de défense : avec cela je pris mon logement. Comme j’étois extrêmement fatigué, je tombai dans un profond sommeil où je goûtai tant de douceur, & réparai tellement mes forces, que je ne pense pas en avoir eu de plus salutaire, ni qu’il y ait beaucoup de gens qui puisse passer une si bonne nuit, dans une si méchante conjoncture.

Il faisoit grand jour lorsque je m’éveillai ; le