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iv. - style, versification et langue

la série féminine aux rimes aire, ance, ele, one, et encore en est-il, parmi ces irrégularités, qui sont à retrancher, si on admet que le renouveleur n’hésitait pas, en certains cas, à violenter la grammaire pour faire sa rime. Lorsqu’on aura fait sur toutes les chansons de geste rimées le travail que nous venons de faire sur Raoul de Cambrai, on reconnaîtra probablement que la proportion d’assonances que nous offre ce dernier poème n’a rien d’exceptionnel. Nous croyons qu’on s’aventurerait beaucoup si on voyait dans ces irrégularités des restes de la forme primitive du poème. Nous aimons mieux y voir de simples négligences.

Passons maintenant à l’étude de la langue. Le but à atteindre consiste à déterminer la patrie du renouveleur. Mais le manque de soin que nous avons constaté dans le style et dans la versification se retrouve au même degré dans l’emploi des formes du langage, et par suite nous ne pouvons compter sur des résultats bien précis. Le renouveleur, en effet, ne fait pas difficulté de donner à un même mot des formes différentes, selon les besoins de la rime. Ainsi il emploie ja dans une tirade en a vv. 169, 2420 et jai dans une tirade en ai, v. 5035 ; de même va, v. 157 et vait, v. 950. Il fait entrer les premières personnes du pluriel dans les tirades en on (vv. 777, 781, 3949, 3950) et dans les tirades en ons (tir. xcvii et cxcvi). Pour les secondes personnes du pluriel des futurs, il se montre non moins éclectique, faisant usage, selon la rime, de la forme étymologique ois (orrois, v. 733, porrois, v. 5513), et de la forme analogique ez (orrez, vv. 590, 4926, ferrez, v. 601, verrez, v. 615. Il dit indifféremment avrai, avra, etc., ou averai, avera[1], etc.). Parfois même il ne

  1. Voir le vocabulaire, sous avoir.