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introduction

d’Arras, se retrouve cependant sous la plume de plusieurs chroniqueurs wallons, mais il désigne alors un chevalier hennuyer qui fut la tige de l’illustre maison d’Avesnes, et qu’une tradition de famille, entièrement indépendante, selon toute apparence, du poème de Raoul, permet de croire le contemporain de Louis d’Outre-Mer [1]. Guerri le Sor, seigneur de Leuze, auquel le comte de Hainaut inféoda le territoire situé entre les deux Helpes, était-il originairement le même personnage que son homonyme du Raoul ? C’est presque certain, car le trouvère du xiie siècle, en désignant une fois par hasard Guerri d’Arras sous le nom de « Guerri de Cimai[2]»,

  1. On peut considérer tout au moins comme une tradition de famille ce début de l’histoire des seigneurs d’Avesnes que Baudouin d’Avesnes, mort en 1289, a inséré dans son recueil de généalogies : « Werris li Sors fut sires de Leuse et sougist a lui aucunes terres entour. Li quens de Haynaut qui adonc estoit, li donna la terre qui est entre les ii Eppres, de quoi li une vient devers Liessies et li autre devers Trelon. Li quars hoirs qui après lui fut, fust sires de Leuze et d’Avesnes, et ot non Weris a la Barbe. Il meit a Fay sor Eppre et fist une petite tour a Avesnes. Quant il fut mors, Tieris ses filz tint la terre : il fist la tour d’Avesnes plus grant. Adonc avoit chanonnes a Liessies, mais cis Thierris les en osta et y mist moinnes noirs. Il moru sans hoir. » (Monum. Germ. histor., XXV, 417-428). Or, si Thierri, qui était le cinquième successeur (hoir) de Guerri le Sor, et qui fonda en 1095 l’abbaye de Liessies, doit être considéré comme le descendant à la cinquième génération dudit Guerri, ce dernier aurait vécu dans la première moitié du xe siècle. Cependant, Jacques de Guise, qui écrivait à la fin du xive siècle, fait vivre Guerri le Sor vers l’an 1020 et le rattache, on ne sait pourquoi, à la famille de Girart de Roussillon (Annales Hannoniæ, l. XIV, c. 52).
  2. Vers 5029. — Il faut, pour se convaincre que Guerri de Chimay n’est point différent de Guerri le Sor, comparer les vers 5029 à 5042 aux vers 3335 à 3344.