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le canada avant la conquête anglaise

profitaient de l’étonnement que ces pratiques causaient aux Sauvages pour leur expliquer les principes élémentaires de la religion chrétienne. Par là, ils excitèrent d’abord leur curiosité, puis leur inspirèrent le désir de voir des prêtres venir les instruire plus à fond de la religion des Français. C’est cette influence des premiers Canadiens venus dans le Nord qui explique, en grande partie, la facilité avec laquelle les tribus Dénés embrassèrent la religion catholique, dès la venue des premiers missionnaires. L’amour de la France les avait amenés à l’amour de la religion catholique. Dans l’esprit des Sauvages, les idées de Français et de catholiques sont tellement unies que, dans la langue montagnaise : Nare oltinen yatriye signifie également : la langue française ou la religion catholique ; de même que Dhèottinen yatriye, signifie : la langue anglaise ou la religion protestante, ou encore, la religion des blancs qui n’en ont point du tout. Car, si les Sauvages peuvent difficilement se figurer un Français qui ne soit pas bon catholique, ce qui est tout à l’honneur des premiers Français venus dans le pays, ils regardent, par contre, comme un phénomène tout à fait extraordinaire un Anglais qui respecte les principes de la morale et qui observe quelques pratiques religieuses ; ce qui ne fait pas précisément l’éloge de la généralité des Anglais avec lesquels ils ont été en rapports jusqu’à ce jour.

Ces postes français, établis jusqu’aux extrémités les plus reculées du Nord, eurent donc une très grande et très heureuse influence sur les mœurs et la mentalité des Sauvages. Mais, ce n’en étaient pas moins des postes isolés, où les Français étaient très peu nombreux. Dans les immenses plaines qui forment aujourd’hui le Manitoba et la Saskatchewan, il semble que leurs établissements aient été plus denses. Là aussi ils se mêlèrent aux diverses tribus sauvages. Mais, dès la fin du XVIIIe siècle, leurs descendants, connus sous le nom de Métis ou de Bois-Brûlés, tout en ayant de nombreux représentants disséminés dans les diverses tribus, étaient assez nombreux pour former une nation distincte, sur les bords de la Rivière Rouge, au point d’intersection des territoires des Algonquins, des Cris, des Sauteux et des Sioux.

Il va sans dire que les établissements français étaient encore plus nombreux à l’est des grands lacs, dans ce qui forme