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comment les nations se sont formées

à se rendre aux vœux et aux appels des populations qui demandaient à être protégées contre, l’arbitraire des tyranneaux locaux.

Partout où l’autorité centrale se borna à protéger ainsi les populations, tout en respectant leurs us, coutumes et libertés locales, son influence fut heureuse, et, tout en étendant sa propre autorité, elle hâta la formation de l’unité nationale. Au contraire, partout où elle chercha à s’imposer de force, elle rencontra la plus sérieuse résistance ; et, au lieu de hâter l’union, elle produisit une plus grande désunion.

Bien plus ; l’unité nationale une fois faite, là où le pouvoir central devenu trop fort, et ne sachant pas borner ses propres ambitions, voulut imposer arbitrairement son autorité, au détriment des coutumes et des libertés locales, il produisit le trouble et la révolution. De cela, nous trouvons un exemple frappant en France. La révolution de la fin du XVIIIe siècle découla incontestablement de l’absolutisme inauguré par Louis XIV et continué par Louis XV. Les divers gouvernements qui, depuis, se sont succédé en France, ayant maintenu et même considérablement renforcé la centralisation de Louis XIV, le trouble et le malaise sont allés continuellement en s’aggravant dans tout le pays, jusqu’aux temps actuels. Car, il importe peu, pour qu’il soit néfaste, que l’absolutisme soit le fait d’un roi, d’un empereur ou d’un parlement. C’est dans ce dernier cas qu’il est peut-être le plus dangereux, parce qu’alors il est impersonnel et irresponsable.

D’un autre côté, si nous considérons l’influence des différentes nationalités les unes sur les autres, une constatation s’impose du premier coup à l’esprit de l’observateur. C’est que, là où l’envahisseur n’a pas cherché à tyranniser la population du pays envahi, en voulant se l’assimiler de force, mais, au contraire, s’est laissé lui-même assimiler par la population au milieu de laquelle il s’était établi — prenant au vaincu, pour la formation de l’unité nationale, plus qu’il ne lui donnait, — là, l’union des races s’est faite et a persisté. Ainsi ont fait les Francs dans les Gaules et les Normands en Angleterre.

Là, au contraire, où l’envahisseur a voulu tyranniser l’en-