D’un autre côté, il est facile de voir que cet auteur connaît admirablement le pays d’Aleth ; il en sait minutieusement les îles et les rochers, il en énumère les chapelles et dévotions particulières. Il appelle Aleth « la nostre cité [1] ». Ce n’est pas sans cause non plus qu’il fait de saint Servan le héros céleste du poème. Il faut au moins admettre qu’il a longtemps séjourné dans la paroisse de ce nom.
Était-ce un clerc ? On l’a avancé en se fondant sur la prolixité des prières et sur la prédilection évidente avec laquelle sont relatés les fondations pieuses, les miracles [2]. Le caractère de l’œuvre ne permettrait guère d’autre supposition si l’on attribue à un seul et même auteur la version que nous possédons. Mais si, au contraire, on reconnaît une seconde intervention, on peut placer à l’origine un véritable trouvère, un jongleur dont l’œuvre pieuse a reçu après coup une empreinte cléricale plus prononcée.
Plusieurs traits sentent ce jongleur, malgré la disparition de l’annonce ordinaire du début.
C’est beau miracle, doit l’en bien escuter [3].