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Madame Jean Bertheroy

Madame Jean Bertheroy est presque la seule, parmi les femmes qui écrivent, à composer des romans d’histoire. Il y faut, outre une science réchauffée et vivante, une imagination de la vue, assez rare chez les femmes : elles n’ont à l’ordinaire que l’imagination du cœur.

Mme Jean Bertheroy a publié d’abord, un recueil de poèmes : Femmes antiques puis Le Mime Bathylle, La Danseuse de Pompéï, Les Vierges de Syracuse, Les Dieux familiers, La Beauté d’Alcias.

C’est un sort délicieux pour un conteur que d’avoir choisi pour le peindre un temps où sous un ciel bleu, un peuple d’athlètes, de sculpteurs, de poétesses et de vierges erre entre des portiques de marbre. Point d’autre souci que de modeler à son tour d’après les antiques modèles d’une beauté sacrée, des figures qui respirent. Mme Jean Bertheroy en a sculpté d’incomparables. Dans l’avenue des héros, à Egine, elle a composé le groupe de Pythéas. Le vieil athlète, appuyé sur sa fille, la poétesse Zénophile aux yeux glauques, et marchant près de son fils Alcias. Elle a reconstruit le décor charmant de Pompéi et le décor magnifique d’Olympie.

Mais ce n’est point là seulement une reconstruction ingénieuse et une jolie décoration. En évoquant exactement la nature et la splendeur antiques, Mme Jean Bertheroy les a animées non point tout à fait de la seule âme grecque, mais d’une âme éternelle, leur contemporaine et la nôtre ; les fêtes d’Olympie et les danses de Pompéi deviennent dans ses livres, en gardant leur beauté qui nous attire, le décor et le symbole de tourments qui nous sont connus : âme et nature, mysticisme et beauté ; double transposition du présent dans le passé, et du passé dans le présent, qui rend infiniment émouvante l’œuvre de M me Jean Bertheroy. Mêlant ainsi les formes anciennes à des pensées vraies, elle est la véritable héritière de cet André Chénier, dont l’Éloge en prose, obtenait de l’Académie le prix d’éloquence.

Elle a revécu, — avec le même sentiment de la beauté, du pittoresque, du drame, de l’âme ancienne et encore vivante de l’humanité, — d’autres époques encore. Elle a écrit Ximenès, Le Journal de Marguerite Plantin (1899), Le Jardin des Tolosati, Les Délices de Mantoue, et enfin, évoquant des figures contemporaines, Le Roman d’une âme (1895), Le Double Joug (1897), Le Mirage (1901).