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introduction

passer rapidement en revue, toutes trois complètes, fait naître l’espoir que leur comparaison pourrait nous offrir un moyen assuré de combler la lacune de notre manuscrit unique de l’Entrée d’Espagne, entre le moment où Roland, vainqueur de Pélias et bailli de Perse, va repousser le retour offensif du roi Malcuidant et celui où Anseïs de Blois épouse la belle Dionès et est fait roi de Jérusalem[1]. Il n’en est rien malheureusement. D’accord sur quelques faits essentiels, nos trois récits diffèrent profondément dans les détails. Or, aucun des trois auteurs ne peut revendiquer à son profit exclusif un brevet de fidélité absolue vis-à-vis du texte dont nous déplorons la perte. Tout au plus est-il permis d’incliner vers la Spagna en prose en tenant compte d’un détail. Les trois récits sont d’accord sur le fait que Roland emmène avec lui, à son retour d’Orient, un « convers » qui périt en Espagne avant d’arriver en vue du camp de Charlemagne devant Pampelune : dans la Spagna en vers, ce « convers » s’appelle Pepagi[2] et est fils de Marchidante ; dans le Viaggio, il porte le nom de Liadrax (t. II, pp. 10 et ss.), et il est aussi fils de « Machidante » ; dans la Spagna en prose, il s’appelle Aquilante et il est frère de « Piliagi » et de « Polinoro », c’est-à-dire neveu, et non fils, de « Machidante » ; or, dans la dernière partie de l’Entrée d’Espagne, le « convers » nous apparaît effectivement sous le nom d’Aquilant, encore que la lacune de notre manuscrit nous laisse ignorer son degré de parenté avec le roi Malcuidant.

Mais il serait hasardeux de conclure absolument du fait que l’auteur de la Spagna en prose a respecté ce nom à sa

  1. Cf. notre chap. i, ci-dessus, p. xviii.
  2. Il faut noter que le ms. ital. 395 de la Bibl. Nat. a changé le nom de Pepagi en celui de Pilliati (chant 19, oct. 3).