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Sommaire.

muni de son cor, et laisse ses compagnons dans une prairie voisine. À l’entrée de la tour, il trouve les deux batteurs qu’Oberon lui a annoncés. Son embarras est grand, lorsqu’il avise un bassin d’or attaché à un pilier. Il frappe trois coups de son épée sur le bassin et fait retentir tout le palais. P. 138-142.

Il y avait dans le palais une pucelle d’une grande beauté, nommée Sébile. Elle accourt à la fenêtre, et, voyant le jeune chevalier, elle se prend à pleurer. Aux trois croix d’or qui brillent sur l’écu de Huon, elle reconnaît un chevalier de France, du pays cher à son cœur, et redoute pour lui la colère du géant. Dans son inquiétude, elle court à la chambre de l’Orgueilleux, et le trouve endormi. Alors elle vient en hâte à la porte du château et en ouvre le guichet. Les deux batteurs étaient machinés de telle façon que, dès que le guichet s’ouvrait, les bras leur manquaient. Huon entre au château et poursuit à grands pas la dame qui s’enfuit ; mais elle lui échappe et le laisse errer seul dans le vaste édifice. Il y trouve d’abord quatorze hommes gisant à terre ; il s’en approche et les remue un à un, mais ils n’ont garde de lui parler. « Par ma foi, se dit-il, il ne fait pas bon ici. C’est le diable qui m’y a conduit ; je n’y resterai pas plus longtemps. » À ces mots, il revient au guichet ; mais les batteurs se sont remis en mouvement. « Je suis pris », dit Huon, et il rentre au château. Il écoute, et entend la dame pleurer. Il se dirige de ce côté et entre dans sa chambre. « Dame, lui dit-il, que Dieu vous garde ! Savez-vous parler ma langue ? De grâce, qu’avez-vous, ma douce amie ? — Seigneur, fait-elle, j’ai grand pitié de vous. Si le maître de céans s’éveille, vous êtes mort. — Quoi ! dit Huon, vous parlez le fran-