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GRÈCE

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laquelle la Sublime Porte exécutait la convention conclue pour la répression du banditisme. Le brigandage recommença à la suite des agitations qui accompagnèrent et suivirent la chute du roi Othon. La convention grécoturque de 1864 n’améliora pas la situation, car les Turcs persistèrent à ne pas l’exécuter, et, à partir du printemps de 1868, le banditisme prit des proportions inconnues jusquelà. Les brigands, sujets ottomans pour la plupart, pénétraient sur le territoire hellénique, et s’ils étaient trop vivement poursuivis, rentraient en Turquie, où ils jouissaient d’une impunité complète. Les contrées les plus ravagées étaient ; comme toujours, les provinces frontières, l’Acarnaniè et la Phthiotide, séparées de la Turquie par les monts Othrys, qu’il faudrait renfermer dans les limites de - la Grèce pour pouvoir assurer la sécurité de ce côté. À peine arrivé au pouvoir, en février 1869, M. Zaïmis prit des mesures pour en finir avec le banditisme, et confia au colonel Coronéos le commandement supérieur des forces destinées à pourchasser les brigands. Cet officier adopta un plan qui consistait tout à la fois à courir sus aux bandits et à relever le courage des populations. « La conséquence de cette ligne de conduite fut, —dit-il dans un rapport qu’il publia au milieu du mois de novembre 1869, — fut que les bandits se tinrent dans l’inaction pendant quatre mois ; mais aussitôt celle voie abandonnée, les actes, de brigandage et les autres crimes redevinrent fréquents et se commirent plus audacieusement qu’autrefois. » Le colonel Coronéos avait été, en effet, relevé de ses fonctions vers la fin du mois de juillet. A tort ou à raison, on n’avait pas trouvé qu’il allât assez vite en besogne, et. on avait rendu, aux chefs militaires de chaque province, la direction des troupes qui s’y trouvaient, en leur abandonnant le soin de les diriger sur les points menacés. Au mois de septembre 1869, la situation était si mauvaise dans l’Acarnaniè, -qu’un ancien ministre, . M. Grivas, député de cette province, adressa aux habitants un manifeste pour les engager à se joindre à lui, et à coopérer avec les troupes à la chasse aux brigands.

Sentant la nécessité d’agir avec énergie et craignant que le jury ne se montrât pas assez sévère, le gouvernement avait présenté à la chambre, en octobre 1869, un projet de loi en vertu duquel le jugement des actes de brigandage devait être enlevé au jury et déféré aux tribunaux ordinaires. Mais cette mesure était contraire à la constitution, et l’opinion publique accueillit très-mal ce projet, que le gouvernement se hâta de retirer. Le jury, d’ailleurs, avait usé d’une sévérité qui rassurait la population. Malgré la bonne volonté dont il avait fait preuve, le cabinet fut violemment attaqué

par l’opposition qui l’accusait non-seulement de mollesse et d’inhabileté, mais encore de mauvais vouloir pour dompter le mal. Au mois de novembre 1869, M." Yalassopoulos, député de Lacédémone, proposa’ même un vote de blâme formulé "en ces termes : « La chambre exprime -son mécontentement pour la manière inefficace dont est poursuivi le banditisme, et pourfe triste état du pays sous le rapport de la sécurité publique. » M. Zaïmis opposa à cette accusation la série des mesures qu’il avait prises, et annonça qu’il était parvenu à obtenir du gouvernement turc la promesse d’une coopération plus sérieuse par la substitution de troupes régulières aux- bachi-bouzouks, qui trop souvent s’entendent avec les brigands au lieu de les combattre. Là motion du député de Lacédémone fut repoussée par 97 voix contre 82.

Une amélioration considérable s’était produite, lorsqu’il arriva, au mois d’avril 1870, à quelqueslieuesau nord d’Athènes, un événement qui eut en Europe un immense retentissement.

Lord Muncaster, qui faisait un voyage d’agrément en Orient, avec sa femme et son ami, M. FrédérickVyner, de la familleGrey etRipon, s’était arrêté à Athènes. Il voulait visiter la plaine fameuse de Marathon, et le 9 avril il fit demander s’il pouvait faire celle excursion sans danger. On lui répondit qu’il rie se trouvait pas de brigands daïisl Attiqu’e. On lui offrit néanmoins, sur sa demande, une escorte de quatre gendarmes à cheval, et le 11, dès le matin, les voyageurs "partirent en voiture, accompagnés de M. Herbert, secrétaire de la légation britannique, de M. Lloyd et de Mme Lloyd, qui avait avec elle un petit enfant de cinq ans, et du comte de Boyl, secrétaire de la légation italienne. Les voyageurs firent leur promenade sans être troublés ; mais dans l’après-midi, lorsqu’ils rentraient à Athènes, et au moment où ils traversaient un petit taillis, des coups de feu retentirent autour d’eux, deux des gendarmes tombèrent, .l’un mort et l’autre grièvement blessé, et des brigands, apparaissant tout à coup, firent prisonniers les voyageurs. -,

Le gouvernement n’avait pourtant donné aux touristes que des renseignements parfaitement exacts. Il résulte en effet de la déposition des brigands tombés entre les mains de l’autorité, que la bande commandée par un eerlain Arvanitaki, se trouvait encore le 10 avril en Béotie, à trois heures de marche au delà de Vilia ; elle était arrivée le soir à ce village, où elle se procura des aliments, et dans la nuit du 10 au 11, elle s’était rendue à Marathon (35 kilomètres d’Athènes). Il paraît même que ces bandits, sujets du sultan et originaires de l’Albanie turque, n’étaient entrés que depuis peu sur’ le territoire hellénique.