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LA RELIGION EN CHINE

trine de la corruption universelle ne diffère en rien dos dogmes chinois sur le même sujet. Beaucoup de philosophes de sa nation, prétendait-il, avaient reconnu que dans la nature humaine, à côté du principe du bien (conscience ou sens moral) coexistait un principe grossier, dangereux dans ses influences, qui réside dans le domaine des passions et agit par leur intermédiaire. Ce germe de mal ne vient point du ciel ; mais il naît spontanément par suite de l’attachement de l’âme pour la matière, et grandit parallèlement à la science du bien et du mal donnée par Dieu. Il ne combattait pas non plus la doctrine de la Trinité, mais quand on lui parlait des miracles et de la divinité du Christ il refusait de les admettre ; ils lui paraissaient impossibles à comprendre. Quelles que fussent ses objections contre la religion de Jésus Christ, il la préférait de beaucoup aux systèmes idolâtriques dominants dans son pays ; il la préférait en théorie au moins ; mais son incrédulité pour l’idolâtrie ne l’empêchait pas de donner sa souscription, quand on la lui demandait, pour les frais du culte dans un monastère bouddhique.

Le conflit des opinions se montre encore dans la méthode de critique des livres sacrés qui s’est introduite depuis peu dans l’école confucéenne. Jusqu’à la dynastie actuelle, les esprits de la classe lettrée étaient gouvernés par une vieille philosophie façonnée à la mode du moyen âge, avec une autorité presque aussi puissante que celle d’Aristote sur les scolastiques. Choo-foo-tsze était le coryphée de cette philosophie. Elle avait une tendance à l’athéisme, niait la personnalité de Dieu, soutenait que le Shang ti des classiques, le Maître Suprême adoré dans l’ancien monothéisme chinois, n’était qu’un principe. Ci ; principe appelé Li, raison, se retrouve dans toute existence, toute chose en est une manifestation ; quelquefois, on en parle comme d’une loi morale ou intellectuelle remplissant le monde entier ; d’autres fois, il n’est plus qu’une très subtile essence matérielle. L’idée de Dieu était réduit à cette conception par les philosophes chinois du moyen âge à peu près à l’époque de la scolastique européenne. Dans leurs mains, la Providence n’est plus que l’action spontanée d’une loi, et la création n’est que le commencement automatique de cette action. C’est franchement l’athéisme. Les auteurs chinois modernes ont compris ce que ce système avait de peu satisfaisant, et ils sont revenus à une idée plus ancienne, dans laquelle la personnalité de Dieu était le point fondamental. Quoique ce système n’ait