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Nous avons dit, en effet, ce qu’était pour l’Inde ancienne ce principe universel et suprême, l’Âtman ou Brahma. Tous les systèmes philosophiques en sont pénétrés. Le Jaïnisme, d’accord avec eux sur ce point, admet l’Âtman. Le Bouddhisme, au contraire, le critique et le rejette.

La substance du monde pour les Jaïns, c’est le jîva, le principe vivant, l’âme. C’est l’Âtman appelé d’un autre nom, et par là s’établissent les plus étroits rapports entre le Jaïnisme et les systèmes du Vedânta et du Sâṃkhya. Pour ces philosophies cependant, l’Âtman est coextensif à l’univers ; pour les Jaïns, le jîva est limité, l’âme est dans chaque être, dans chaque objet, elle anime et pénètre jusqu’à la moindre particule de matière brute.

Par un autre point encore, le Jaïnisme rappelle les systèmes orthodoxes. D’un côté et de l’autre, la notion de qualité disparaît en quelque sorte, absorbée par la notion de substance. Non seulement, selon les Jaïns, le jîva et la matière sont substances, mais aussi le temps et l’espace, et de plus le dharma et l’adharma. En vain chercherait-on ailleurs que dans le Jaïnisme une théorie qui considère ainsi comme des substances la loi religieuse et ce qui lui est opposé, le démérite.

Une doctrine par laquelle le Bouddhisme et le Jaïnisme se ressemblent jusqu’à se confondre, c’est celle du karman et de la métempsycose. Mais ici l’analogie ne permet aucune conclusion en faveur ou en défaveur de l’une ou de l’autre religion. Toutes deux avaient sur ce point un modèle commun, le Brâhmanisme. Elles ne pouvaient s’en écarter sans risquer de s’aliéner à jamais la pensée indoue. Agir, souffrir, mourir, renaître, et de la sorte jusqu’à la Délivrance finale : tel était, nous le savons, le thème accoutumé de toute spéculation philosophique.

Cependant, s’il faut s’affranchir du karman, les moyens sont variés. Aussi le Jaïnisme et le Bouddhisme, tout en