Page:Annales du Musée Guimet, Bibliothèque d’études, tome 22-23.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un personnage historique. Tous deux ont existé, et leurs carrières furent sans doute aussi différentes que pouvaient l’être celles de deux contemporains de même origine, vivant dans des conditions semblables et poursuivant un but analogue.


II. Les différences entre les doctrines ne sont pas moins caractéristiques. Elles intéressent les dogmes fondamentaux et mettent en évidence l’originalité du Jaïnisme par rapport au Bouddhisme.

Sans doute de part et d’autre il s’agit de religions athées d’où tout dieu personnel et créateur est banni. Un Jaïn donne sa loi aux Jinas et un Bouddhiste aux Buddhas. Jinas et Buddhas se ressemblent, et de plus apparaissent à des époques déterminées. C’est qu’en effet ils rappellent les uns et les autres la vieille conception indoue des avatars. Mais aussi les Bouddhistes comptent vingt-cinq Buddhas, et les Jaïns seulement vingt-quatre Tîrthakaras. Qu’est-ce à dire sinon que les Bouddhistes doivent être venus un peu plus tard, et ont renchéri sur leurs rivaux, les Jaïns ?

Admet-on d’ailleurs entre les deux religions la plus complète analogie au point de vue mythologique, on est obligé de les différencier au point de vue philosophique et doctrinal.

Le Bouddhisme n’offre rien qui rappelle la théorie jaïna de la connaissance et les cinq degrés qu’elle comporte. Nous savons aussi combien originale est la métaphysique du « peut-être », syâdvâda, s’opposant à celle du vide ou du néant, śûnyavâda. Enfin si pour les Jaïns comme pour les Bouddhistes le monde est incréé et éternel, la conception que s’en font les premiers diffère totalement de celle des seconds. Ici nous nous rendons compte comment les Jaïns, tout en s’élevant contre l’exclusivisme des Brâhmanes, sont restés fidèles à la pensée séculaire des Indous.