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SUR LE CALCUL DIFFÉRENTIEL.

qu’ils ne sont pas à la hauteur à laquelle la science est portée depuis Leibnitz, puisqu’ils évitent cette région élevée où se trouve le principe de la génération des quantités, et par conséquent la véritable source des lois mathématiques, pour venir ramper dans la région des sens, la seule connue des anciens, où l’on ne trouve que le grossier mécanisme des calculs. » (Réfutation de la théorie des fonctions analitiques de Lagrange, Paris, 1812, Page 40) Déjà, dans un premier ouvrage (Introduction à la philosophie des mathématiques. Paris, 1811), le même auteur, en annonçant que « les procédés (du calcul différentiel) implique une antinomie qui les fait paraître, tour à tour, comme doués et comme dépourvus d’une exactitude rigoureuse »… (Philosophie, etc., page 32), avait gourmandé les géomètres non infinitaires, avec ce ton tranchant et cette emphase dogmatique qui forment la couleur dominante des écrits inspirés par le Système philosophique (celui de KANT) dont il fait profession.

Essayons, un instant, d’apprécier tout cela à sa juste valeur.

D’abord, je me rappelle fort bien que Kant, trouvant l’infini dans la raison pure et le fini dans la sensibilité, a conclu, de la coexistence de ces deux facultés dans l’être cognitif, qu’il doit y avoir, relativement à l’idée cosmologique, par exemple, plusieurs antinomies qui ne sont au fond que des illusions auxquelles il n’est point difficile de se soustraire, quand on veut bien distinguer soigneusement ce que chacune des formes de la cognition y apporte pour sa part. Faisons la même chose, par rapport à la prétendue antinomie mathématique que le disciple s’applaudit d’avoir découverte dans la théorie du calcul différentiel. Admettons, ce qui est vrai, que le calcul appartienne exclusivement à la sensibilité qui, selon ces Messieurs, est la faculté de l’individuel ; il s’ensuivra qu’il y a, non seulement paralogisme, mais erreur palpable à soumettre au calcul l’infini, qui est du domaine d’une autre faculté : celle de l’absolu, ou ce qu’ils appellent la raison pure. Je demande pardon à mes lecteur de l’emploi que je viens de faire d’un idiome