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des matiéres qui les contiennent. Alors, il est évident que si nous parvenons à décomposer les corps les plus différens entre eux et à les résoudre en d’autres corps, simples, inaltérables, qui se trouvent toûjours les mêmes en qualité dans touttes nos Analyses, et que, reunissant ces derniers en mêmes quantités respectives ils nous reproduisent les premiers, nous serons en droit de conclurre qu’ils sont les vrais principes ou Elemens des Corps, et que tout l’Univers n’est formé que de leur union et combinaison. Que si [5] ces mêmes principes se réduisoient à un seul, alors celui là seroit effectivement cette matiére prémiére des Philosophes, base et substance de tous les corps, qui n’étant par raport à son idée qu’une pure abstraction, ne peut être admise comme réellement existante tant que nos expériences ne nous convaincront pas de sa réalité.

Le feu est l’agent principal que les Chymistes employent à cette Analyse, et voici le principe sur lequel ils se fondent pour cela. Quels que soient les Elémens dont les corps sont composés, nôtre industrie mécanique ne nous fournit aucun instrument capable d’en (5) faire la division et de resoudre ces corps en leurs parties constitutives : Car quelque partie que nous prenions d’une Substance quelconque, elle sera toujours partie intégrante de la même substance, c’est à dire composée des mêmes[1] principes ; ainsi des sections prolongées autant qu’on voudra sur un morceau de plomb ne nous donneront jamais que des particules de plomb extrémement[2] petittes[3]. La petitesse des Elémens aussi bien que leur figure échappera toûjours à nos sens et par conséquent à nos outils les plus déliés. Il ne sert donc de rien à nôtre recherche

  1. Ici finit la feuille de copie de la bibl. de Neuchâtel (fragment 4).
  2. L’auteur avait écrit infiniment, qu’on peut encore lire sous extrémement, de là la note ci-dessous.
  3. Il faut prendre icy le mot d’infini dans le sens étendu, comme une division prolongée fort loin, et des parties extrémement petittes. (R.)