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incidents de notre voyage, je ne puis résister au plaisir de transcrire ici la traduction d'un chant national que nous avons recueilli sous la tente mongole.

« Le repas patriarcal qu'on nous avait servi était achevé, et il ne restait plus au milieu des convives qu'un entassement d'os de mouton bien blancs et bien polis, lorsqu'un enfant alla détacher un violon à trois cordes suspendu à une corne de bouc. Il le présenta à un vénérable vieillard, et celui-ci le fit passer à un jeune homme qui baissait modestement la tête, mais dont les yeux s'animèrent subitement, aussitôt qu'il eut entre les mains le violon mongol. — « Lamas du tout-puissant Jéhovah, nous dit le chef de famille, j'ai invité un Toolholos pour embellir cette soirée de quelques récits. » Pendant que le vieillard nous adressait ces mots, le chanteur préludait déjà en promenant ses doigts sur les cordes de son instrument, et bientôt il se mit à chanter d'une voix forte et accentuée. Quelquefois il s'arrêtait et entremêlait son chant de récits animés et pleins de feu. On voyait toutes ces figures tartares se pencher vers le chanteur et accompagner des mouvements de leur physionomie le sens des paroles qu'ils entendaient. Le Toolholos chantait des sujets nationaux et dramatiques qui excitaient vivement la sympathie de ses compatriotes. Pour nous, peu initiés à l'histoire de la Tai tarie, nous prenions un assez mince intérêt à tous ces personnages inconnus que le rapsode mongol faisait passer tour à tour sur la scène.

« Après qu'il eut chanté quelque temps, le vieillard lui présenta une grande tasse de vin de lait. Le chanteur posa aussitôt le violon sur ses genoux et se hâta d'humecter, avec cette liqueur mongole, son gosier desséché par tant de merveilles qu'il venait de raconter. Quand il eut achevé de boire et pendant qu'il essuyait de sa