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— « Bravo ! c’est comme cela qu’il faut traiter ceux qui mangent le morçeau ! Mais entrons prendre un souper, tu l’as bien mérité. Pour nous mettre en appétit, tu me conteras cette affaire. »

En prononçant ces paroles, ils entrèrent tous deux dans une auberge.

L’homme qui venait de périr par une mort si cruelle s’appelait James Stewart, le même que nous avons vu participer dans le vol chez Madame Montgomery. Il avait payé cher un mot échappé dans un moment d’ivresse. Ses meurtriers… ? il ne nous est pas donné de les nommer.



CHAPITRE XI.


Les meurtres de Montmorancy. — Cambray au Presbytère. — La Ménagère babillarde. — Le bedeau accusé. — Les deux Griffiths.


Un soir qu’il pleuvait par torrens, et que les ténèbres étaient si épaisses qu’on ne pouvait se voir à trois pas, deux habitans de la Paroisse du Château Richer revenaient du marché, et, s’en retournant chez eux, passaient à gué l’étendue d’eau qu’il y a au-dessous du Sault Montmorency, quand tout-à coup cinq bandits, armés de bâtons et de poignards, se présentent à eux et les saisissent au collet, en leur adressant le mot terrible : —

« La bourse ou la vie. »

« Eh bien ! la vie ; car je n’ai point d’argent, » dit l’un d’eux.

— « Mensonge ! je t’ai vu recevoir cinquante piastres au marché, il n’y a pas quatre heures : notre chaloupe est bonne voilière ; nous vous avons devancés, voilà tout ! donne, donne, car nous ferons suer le chène, (nous verserons le sang.)

Et les deux habitans, épouvantés et trop loin des maisons pour crier au secours, tirèrent leur bourse, et comme l’un d’eux présentait la sienne à celui qui le tenait à la gorge, et se penchait vers lui, il fit un mouvement de surprise, et s’écria : —

« Quoi ! Polette, c’est toi ! Tu as le cœur assez dur pour assassiner sur la route les compagnons de ton enfance, ceux avec qui tu as été élevé, qui te connaissent, qui t’ont sauvé vingt fois la vie, en passant sous silence tes fredaines. »