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IX


O quelle solitude en ce grand val perdu !
Ainsi qu’un long fil d’or tiré de la quenouille
Du Temps, les jours passaient sans rien d’inattendu ;
Ils furent le ciel clair que trop de soleil brouille

Ces jours de pur bonheur où tout est confondu ;
Nous avions oublié nos noirs pays de houille,
Et ce fut dans nos cœurs un réveil éperdu
Quand un chêne rougit de sa première rouille.

Nous revenions le soir, lorsque tu me dis : « Vois
Cette feuille de chêne ! » et soudain nous comprimes,
Car la même pensée altéra notre voix.

Puis, les yeux pleins de pleurs, sans parler, nous cueillîmes
Ce rameau qui marquait la fin de nos beaux mois,
Tandis que le soleil se mourait sur les cimes.