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XXXVIII

 
Après qu’Eve et Adam, hors du jardin céleste,
La face des premiers pleurs terrestres trempée,
Furent, pour tous les temps, exilés par le geste
De l’Ange qui tenait la flamboyante épée,

Seuls sur la vaste terre encore inoccupée,
Et sous un firmament nébuleux et funeste,
Dans la hutte d’argile à peine enveloppée
Par les grossiers essais de leur labeur agreste,

Las, mornes, dégradés, souhaitant de mourir
Et maudits, ils gardaient pourtant le souvenir
Des bosquets radieux de divine rosée.

C’est cette vision de l’immortel séjour,
En l’âpre descendance humaine éternisée.
Dont sont faits aujourd’hui les rêves de l’Amour.