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XII


 
L’année a ramené le triste anniversaire
De cette nuit d’adieu dans la petite église,
Et sur ce souvenir mon cœur navré se serre,
S’y déchirant toujours à la même surprise.

Dans les griffes du soir le jour pâle agonise,
Saignant comme un oiseau grisâtre que lacère
Un immense oiseau noir qui grandit dans la bise ;
Sous ce meurtre la mer gémit avec colère.

Sur ce cap où, parmi les coups sourds de l’écume,
L’aigu cri des oiseaux de passage tournoie,
Je veux passer la nuit, jusqu’à ce que je voie,

Dans le ciel inquiet et tourmenté d’alarmes,
Se lever, à travers son lourd voile de brume,
Une aurore meurtrie et déjà tout en larmes.