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vi

L’ENCHANTEUR MERLIN



C’est Léonard. Il s’est mis en quête de Viviane, dans la forêt de l’Occident. Il a réveillé la fée endormie, le sourire de l’Intelligence.

Telle est sa magie, si l’on veut que Léonard soit un mage. Ce grand esprit est pourtant sans passion. Il rêve de poésie. Il est partagé entre l’art et la science. Il semble ne vivre que pour connaître : beaucoup moins pour créer. Il est de son temps par l’inquiétude, et encore plus du nôtre. Il a toutefois la certitude de la recherche ; et pour lui, qui cherche, trouve. Par mille points, il touche aux âges de la foi.

Ce qu’il a ne lui suffit point. Son esprit poursuit partout l’objet : il le saisit souvent, et souvent il le manque. Sa curiosité est patiente, et son action se lasse vite. Son âme rêve d’un monde idéal, qu’il n’arrive pas à former.

Tant qu’il étudie et qu’il observe, il est l’esclave de la nature. Dès qu’il invente, il est l’esclave de ses idées ; la théorie étouffe en lui le jet ardent de la création. Nées de la flamme, la plupart de ses figures sont tièdes, et quelques-unes glacées.

Il n’y a point de réalité dans ce qu’il fait. Rien ne vaut ses des-