les sépare. Socrate avait quatorze ans quand Euripide donna sa première pièce. Mais il pourrait avoir converti Euripide vieillissant. L’objection qui porte, c’est qu’il n’y a entre la doctrine de Socrate et la sagesse qui filtre à travers les aphorismes d’Euripide aucune ressemblance. Il y a tel vers où le poète semblera dire, avec Protagoras, que la vertu peut s’enseigner. Pourtant sa croyance profonde est celle de son Électre : des dispositions innées fixent notre destinée. Dans Phèdre, il redira que la misère de la condition humaine tient à ce que nous connaissons le bien et ne le pratiquons pas. Et comment découvrir un optimisme rationaliste chez le poète qui, par tant d’œuvres, par Médée, par les Héraklides, Andromaque les Phéniciennes, disait la fragilité du monde et l’injustice qui en est l’universelle maîtresse ? Quelle dégénérescence peut-il y avoir de Sophocle à Euripide, quand Euripide est mort quatre ans avant cette tétralogie d’Œdipe qu’on lui oppose[1] ? Mais il reste que Nietzsche, en dépit de sa chronologie hâtive, est fondé à objecter la différence de style, je ne sais quelle brisure du rythme dans plus de morbidesse ; enfin, dans cette mythologie fixée une dernière fois par Euripide, une humanité, une souffrance, une pitié qui annonce la prédominance de l’esprit. On peut dire que dans la répulsion de Nietzsche pour Euripide, il y a, comme pour Socrate, le sentiment d’une affinité trop dangereuse.
Wilamowitz faisait la partie belle aux adversaires, quand pour conclure il invitait Nietzsche à descendre de la chaire, où il était chargé d’enseigner la science[2]). Richard Wagner se chargea de répondre. Un article publié dans la Gazette de l’Allemagne du Nord se porta