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sans parler de ma position et de ma fortune, je désire que vous ne me tutoyiez pas.

— Je vous demande pardon ; c’est une ancienne habitude. Vous avez parfaitement raison, cela ne m’arrivera plus. Enfin que voyiez-vous ?

— Tout ! j’ai tout vu et je sais tout.

— Quel aspect vous offraient les salles de l’intérieur ? Ressemblaient-elles à une fraîche forêt, à une sainte église ou au ciel étoilé ?

— Elles ressemblaient à tout cela. Il est vrai que je ne les traversai pas ; mais, de l’antichambre, je vis tout.

— Mais enfin, les dieux de l’antiquité passaient-ils par ces grandes salles ? Les anciens héros y combattaient-ils ? Est-ce que des enfants charmants y jouaient et racontaient leurs rêves ?

— Je vous répète encore une fois que j’ai tout vu. En y entrant, vous ne seriez pas devenu un homme ; mais moi j’en devins un. J’y appris à connaître ma véritable nature, mes talents et ma parenté avec la Poésie. Lorsque j’étais encore avec vous, je n’y réfléchissais jamais ; mais vous devez vous rappeler comme je grandissais toujours au lever et au coucher du soleil. Au clair de la lune, je paraissais presque plus distinct que vous-même, seulement, je ne comprenais pas alors ma véritable nature ; c’est dans l’antichambre que j’ai appris à la connaître. J’étais mûr au