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Bouilly pleurait en racontant un mariage : jugez d’après cela de ce qu’il pouvait faire d’un enterrement ?

Le corbillard était comme le char de triomphe de M. Bouilly ; il le guettait, il était à l’affût de toute cérémonie funèbre, et, pour peu qu’il eût connu le défunt, il prononçait sur sa tombe un discours, dont les larmes étaient la plus entraînante éloquence ; aussi était-il connu des fossoyeurs, qui le regardaient comme un des leurs et faisant partie de l’entreprise des pompes funèbres. Un matin, pendant un discours prononcé par un membre de l’Institut sur la tombe d’un de ses confrères, le chef des fossoyeurs dit assez haut pour être entendu de tous :

— Est-ce qu’il serait possible que nous n’eussions rien de vous aujourd’hui, monsieur Bouilly ?

Un autre jour, deux convois de personnes de sa connaissance avaient lieu à peu près à la même heure, l’un à Montmartre et l’autre au Père-Lachaise. Bouilly se trouva un peu en retard pour le second, et ne rejoignit l’enterrement qu’au cimetière ; il courut aussitôt à l’endroit où il aperçut du monde, et, tout haletant, il prononça un dis-