Page:Anatole France - L’Église et la République.djvu/49

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’ordre de saint Dominique, institué pour combattre l’hérésie, se retrouva fidèle à sa mission première. Ses prédicateurs tonnèrent avec un éclat formidable, et non toutefois sans précaution. Ils commençaient à être contents de la République et ils attendaient de grands biens du ministère Méline : Un frère prêcheur, le Père Maumus, le dit expressément dans son livre sur les Catholiques et les Libertés politiques : « La politique du cabinet sera, si elle triomphe, infiniment plus avantageuse à l’Église que ne le serait un retour à l’ancien régime ».

Cependant, d’un plus robuste effort que le Gesù et que les Frères prêcheurs, les Assomptionnistes travaillaient à la révolution sainte. C’était un ordre nouveau fondé vers 1850. Ils étaient, dans leurs façons, rudes et grossiers, d’allure paysanne. Ils se disaient pauvres, très pauvres, et, comme les oiseaux du ciel, attendant chaque jour la becquée. Et ils possédaient quatorze maisons avec un fonds de roulement d’un million et plus. On trouvera sur eux des renseignements précis dans le compte rendu du procès qui leur fut intenté. Ils s’étaient enrichis à vendre les miracles de saint Antoine. On sait ce que la basse dévotion moderne a fait de ce franciscain rempli de courage et de pitié, qui, dans un siècle dur et sombre, consacra sa vie à défendre les pauvres contre l’avarice des évêques et la cruauté des princes. Maintenant, par l’intermédiaire des Assomptionnistes, il retrouve, moyennant un honnête salaire, les objets perdus, et non pas seulement l’argent, les