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par des sarcasmes les prières par lesquelles elle se recommandait à la miséricorde divine ; elles la menaçaient de la colère de Dieu et de la damnation éternelle ; elles lui disaient qu’il n’y avait pour elle aucun espoir de pardon et jonchaient ainsi d’épines la couche douloureuse de la mort. Telles furent les souffrances de cette malheureuse infortunée, jusqu’au moment où la mort vint la soustraire à la malice de ses persécutrices. Elle expira entre l’horreur du passé et la crainte de l’avenir ; et ses derniers moments furent si terribles qu’ils durent amplement satisfaire la haine et la vengeance de ses ennemis.

L’abbesse, aussitôt que sa victime eut cessé de respirer, sortit de la chambre ; ses complices la suivirent.

Ce ne fut qu’alors que j’osai sortir de mon asile. Je n’avais point défendu ma malheureuse amie, sachant bien que, sans pouvoir la sauver, j’aurais subi le même sort. Frappée d’horreur et d’effroi, j’eus à peine la force de regagner ma cellule. Avant de passer la porte de celle d’Agnès, je jetai un dernier regard sur le lieu où gisait sans vie cette fille naguère si aimable et si belle ; je fis du fond de mon cœur une prière pour le repos de son âme, et je