personne qui voulût lui parler de son frère, et
comme il l’aimait encore (car il faut en convenir,
l’éclat de ses charmes faisait oublier son apparente
bêtise), il craignait de se trahir dans un tête-à-tête.
Ne trouvant cependant aucun prétexte pour
se dispenser d’aller chez une personne si intéressante
que mademoiselle Précieux, il dit à Catherine
qu’il allait la suivre ; en effet, il arriva presqu’en
même temps qu’elle chez sa maîtresse. Il fut
frappé en entrant de l’air de tristesse de cette digne
fille ; la mauvaise nuit qu’elle avait passée et
les inquiétudes qu’elle avait depuis près de vingt-quatre
heures, l’avaient aussi changée que la plus
longue maladie. — Qu’avez-vous donc, mademoiselle ?
vous paraissez bien souffrante. — Ma santé
serait bonne, mon père, si je n’avais pas la plus
extrême douleur. Elle lui raconta tout ce qui
s’était passé, et finit en le suppliant d’en instruire
madame Moreau. — Vous avez sa confiance, son
amitié ; elle ne peut qu’être reconnaissante des
soins que vous avez pour son petit-fils, quoiqu’elle
ne veuille pas en convenir. Elle vous écoutera
avec plus de modération que moi. Je ne me sens
pas le courage de m’exposer aux premiers mouvements
de sa colère. Mon cœur est pur et je sens
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