Page:Ami - Le naufrage de l'Annie Jane, 1892.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.
17

de faire du feu dans la cuisine. Pendant trois jours, nous fûmes ainsi ballottés par les flots ; les matelots ne pouvaient que rester oisifs, et quant à nous, force nous fut de demeurer dans nos cabines ou dans le salon pour obéir aux ordres du capitaine. Ces trois jours nous parurent trois siècles. Nous les passâmes à prier, à lire la parole de Dieu et à nous encourager mutuellement. Les nuits nous paraissaient encore plus longues, car nous ne pouvions dormir. Tout ce que nous pouvions faire, c’était de nous cramponner à nos lits pour ne pas être lancés d’un côté à l’autre de nos cabines. Enfin, pendant la nuit du 26 septembre, le calme se rétablit, et nous fûmes heureux de pouvoir monter sur le pont.

Mais quel ne fut pas notre étonnement ! Quel triste spectacle se présenta alors à nos regards ! Le vaisseau était à peu près désemparé. Les mâts cassés à la hauteur du premier hunier, les cordages flottant au gré des vents, une seule voile en lambeaux, une partie du gouvernail brisée, la boussole et une des chaloupes emportées par un coup de mer, voilà quelques-uns des dégâts de cette terrible tempête. Autant il est beau, et je devrais dire majestueux, de voir un navire voguer à pleines voiles, autant il est triste d’en voir un dans l’état où était alors le nôtre. Chacun se sen-