Page:Amaury-Duval - L’Atelier d’Ingres.djvu/69

Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
L’ATELIER D’INGRES.

Les yeux baissés, le coude appuyé sur une fontaine dont l’eau avait empli sa cruche qui débordait, Laïs avait une pose d’une innocence un peu affectée et très-spirituellement exprimée. De l’autre côté, Apelles, le corps penché vers elle et sa main près du bras de la jeune fille, la touchait légèrement du petit doigt.

Tout cela, avec le style, le goût et la fantaisie d’Hamon, eût été une ravissante chose ; mais la figure de la femme avait plutôt le sentiment gothique ; la tête seule d’Apelles était tout à fait réussie.

Tel qu’il était, ce tableau me ravit, et il eut assez longtemps une grande réputation parmi nous. Il exécuta ensuite un tableau de femmes chinoises qui fit bondir M. Ingres. Plus tard, il arriva à une exécution plus bruyante que brillante, et son Saint Georges, que je vis chez lui, m’éblouit par l’éclat des armures, d’une façon si désagréable, que je ne pus m’empêcher de lui en faire l’observation.

« Vous verrez cela au Salon, me dit-il ; ce ne sera que juste. »

J’avoue que je ne m’étais jamais imaginé qu’on dût travailler pour le Salon, et je fus choqué dans ma naïveté. J’en ai vu bien d’autres depuis !

Il avait toujours, en travaillant, une arrière--