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ENVOIS À L’EXPOSITION.

mes tableaux me revenaient du Salon plus ou moins contestés. Cette année-là, ma toile était importante : je crus devoir l’apporter moi-même, mais sans grande confiance dans le résultat ; aussi n’avais-je pris qu’un simple sac de nuit, bien persuadé que je m’en retournerais comme j’étais venu. J’eus le bonheur de trouver dans mon ami M. de Forbin un protecteur des plus chauds. Quand il vit mon tableau, que j’avais fait tendre dans une salle du Louvre, il me témoigna vivement son contentement, et voulut qu’il ne fût montré au public que dans la dernière quinzaine de l’Exposition, et à une place d’honneur. J’étais fort heureux ; mais, mon cher ami, quand le Salon fut ouvert, quand j’y pénétrai, je fus ébloui par tout ce que je voyais, et je fus pris d’un vrai découragement. Il y avait vingt ans que je n’étais venu en France, je ne connaissais rien de ce qui s’y faisait, et je fus tellement surpris du talent, et surtout de l’exécution si habile de mes confrères, que, sans les encouragements que me donnait Forbin, sans l’assurance qu’il me paraissait avoir en mon succès, je n’aurais pas osé affronter ces comparaisons. Enfin il fut fait comme il l’avait dit : quinze jours avant la fermeture, mon tableau fut exposé, et, pour la première fois, le public et les critiques ne me refusèrent pas absolument tout. »