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ENVOIS À L’EXPOSITION.

ques faiblesses de cette nature si puissante, si indomptable quand il s’agissait de son art, si privée de logique, si éloignée quelquefois du sens commun, lorsque l’art n’était plus en jeu. Il eut toute sa vie les qualités et les défauts d’un enfant, sensible, ému pour bien peu de chose, ignorant absolument la vie et ses exigences. Il paraissait souvent n’avoir pas conscience du mal qu’il pouvait faire. Aussi, je le répète, quand on avait vu comme moi au fond de cette organisation incomplète et dirigée uniquement d’un seul côté, la plainte devenait impossible et inutile.

Le matin où je portai, bien ému, mon portrait chez M. Ingres, qui demeurait alors à l’Institut, je fus introduit dans un petit cabinet donnant sur la cour, et dont les murs était couverts de merveilles : des études, un portrait à la mine de plomb de madame Ingres, jeune et portant un chapeau à la mode du temps, fort bizarre, mais quel dessin ! une répétition en petit de l’Odalisque assise de dos sur le coin d’un lit, la plus belle de ses odalisques, et, ce qui me causa un certain étonnement, la gravure du Coucher de Vanloo. Plus tard, une conversation qui eut lieu à Rome me confirma dans l’opinion que M. Ingres était beaucoup moins exclusif qu’on ne pensait.

J’étais là, entouré de ces belles choses et occupé à placer mon portrait dans son jour,